Expertise de sûreté nucléaire

Appuyés notamment sur un effort permanent de recherche et sur le retour d’expérience des évaluations de sûreté précédentes, les travaux d’expertise de l’IRSN ont pour objectif d’étayer les prises de position des autorités et pouvoirs publics sur l’ensemble des dossiers de sûreté nucléaire, qu’ils se rapportent à des installations en fonctionnement, en construction ou en démantèlement, ou encore à de nouveaux concepts comme les réacteurs modulaires de faible puissance (SMR).

En 2021 encore, les interventions de l’IRSN en matière d’expertise de sûreté ont été rendues possibles par un effort d’adaptation aux exigences imposées par la crise sanitaire de la Covid-19, qui a induit en particulier un décalage d’activités telles que les arrêts de tranches pour maintenance et les rechargements de cœurs en combustible. Par ailleurs, en réponse à la montée en puissance des activités d’expertise liées au démantèlement et à la reprise des déchets anciens, l’IRSN a revu son organisation en regroupant ses experts dans ce domaine au sein d’un même service, permettant ainsi une approche transverse de l’examen des dossiers des différents exploitants nucléaires et une hiérarchisation en termes de priorités d’expertise.

Si l’année 2020 avait été marquée par la publication de l’avis de synthèse du 4e réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe (RP4 900), 2021 aura été, d’une part celle de l’enclenchement des travaux relatifs à la phase générique du 4e réexamen périodique de ceux de 1 300 MWe (RP4 1 300) et, d’autre part celle des expertises menées dans le cadre de la mise en service du réacteur EPR de Flamanville (Manche).

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avis et rapports techniques adressés
à l’ASN

353

hommes.an (etpt) consacrés
à l’expertise de sûreté nucléaire

Préparation du RP4 1 300

Construits pour la plupart dans la décennie 1980, les vingt réacteurs du parc électronucléaire français d’une puissance de 1 300 MWe entrent aujourd’hui dans la phase générique de leur 4e réexamen décennal (RP4 1 300). En 2021, l’IRSN a engagé l’examen des dossiers de sûreté correspondants transmis par EDF en vue d’élaborer – comme il l’avait fait en 2020 pour le 4e réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe (RP4 900) – un avis destiné à fonder au plan technique la position de l’ASN sur l’aptitude des réacteurs concernés à poursuivre leur exploitation. Cette phase générique se complétera d’une visite décennale de chaque réacteur comprenant des essais tels qu’une épreuve hydraulique du circuit primaire, une inspection de la cuve du réacteur ou encore un test de résistance de la double enceinte en béton qui entoure le bâtiment du réacteur.

Essais de démarrage de l’EPR de Flamanville

L’IRSN a par ailleurs engagé l’expertise des résultats des essais de démarrage effectués par EDF dans le cadre de la demande d’autorisation de mise en service du réacteur EPR de Flamanville (EPR FLA-3) afin de s’assurer que les équipements et systèmes du réacteur fonctionnent conformément aux hypothèses d’étude et satisfont aux critères fixés en termes de performance. L’analyse de l’Institut montre que, bien que le volume de travail effectué par EDF soit significatif, le nombre de procédures d’essais non réalisées ou seulement de manière partielle reste encore conséquent. Ces procédures seront déroulées dans la prochaine phase d’essais de démarrage prévue au troisième trimestre 2022.

schema reacteur SMR
Vue, en images de synthèse, du principe du réacteur SMR étudié
par le consortium Nuward © Nuward Consortium
Brève
illustration breve
icone fichier avec viseur

L’IRSN publie une note d’information relative aux enjeux de sûreté des réacteurs modulaires de faible puissance

Plus connus sous leur sigle anglais SMR (pour Small Modular Reactors), ces réacteurs d’une puissance inférieure à 300 MWe se caractérisent par une conception simplifiée par rapport aux réacteurs de forte puissance qui constituent le parc nucléaire actuel. Parmi les quelque 70 concepts de réacteurs proposés à travers le monde – pour la plupart d’entre eux à un stade préliminaire –, celui d’EDF est un concept de réacteur à eau sous pression (REP) dénommé NUWARD et destiné à l’export. L’analyse des éléments disponibles tend à montrer que les SMR disposent, a priori, de caractéristiques favorables quant au respect des objectifs de sûreté plus exigeants que les réacteurs de forte puissance en termes de limitation des rejets en situation normale et accidentelle – y compris d’accident grave – et de fréquence de fusion du cœur. Dans sa note d’information, l’Institut rappelle toutefois que ces différents concepts doivent être examinés en détail afin de pouvoir se positionner plus avant sur le niveau de sûreté qui peut être atteint par ce type de réacteur.

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RÉACTEURS DE 1 300 MWe EN EXPLOITATION
EN FRANCE ENTRENT EN PHASE GÉNÉRIQUE
DE LEUR 4e RÉEXAMEN DÉCENNAL

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RÉACTEURS DE 1 450 MWe EN EXPLOITATION
EN FRANCE

image illustration nuclear reactor

Démantèlement du réacteur nucléaire de Brennilis

En mars 2021, l’IRSN a présenté au groupe permanent d’experts « démantèlement » de l’ASN les conclusions de son expertise du démantèlement complet de la centrale nucléaire des Monts d’Arrée située à Brennilis (Finistère), renfermant le réacteur EL4 d’une puissance de 70 MWe, arrêté en 1985. L’Institut a examiné notamment l’organisation définie par EDF pour favoriser le lien entre son ingénierie et les équipes affectées aux opérations sur site, les principes d’assainissement des structures et des sols du site. Il a estimé qu’EDF devait viser en premier lieu un niveau d’assainissement compatible avec tout usage public du site. Dans ses conclusions, il a souligné l’émergence de thématiques techniques susceptibles d’être transposées du démantèlement en cours du réacteur Chooz A (Ardennes). Elles concernent par exemple la capacité d’EDF à décontaminer des générateurs de vapeur, de manière à réduire le niveau de radioactivité des déchets et l’exposition radiologique des travailleurs, ou l’utilisation de moyens télécommandés de découpe sous eau de la cuve du réacteur.

Exploitation des réacteurs de 1 450 MWe

À la demande de l’ASN, l’IRSN a examiné la possibilité, sur le plan de la sûreté, de l’exploitation des réacteurs de 1 450 MWe (palier N4) concernés par un phénomène de corrosion accélérée des gaines de combustible en alliage M5, attribué principalement à l’ébullition nucléée ainsi qu’à la faible teneur en fer des lots de matières utilisés pour la fabrication de ces gaines. Ce phénomène de corrosion accéléré affecte également, dans une moindre mesure, certains réacteurs de 1 300 MWe et 900 MWe, du fait de sollicitations thermohydrauliques moindres. Si ce phénomène est inédit en France, il a déjà été observé à l’étranger sur des réacteurs exploités en Allemagne et au Brésil. EDF s’est engagée à poursuivre les investigations afin d’améliorer la compréhension fine des mécanismes à l’origine de ce phénomène et prévoit en outre des mesures compensatoires sur les quatre réacteurs du palier N4 afin d’en réduire la probabilité d’occurrence et les conséquences potentielles. L’IRSN a estimé satisfaisantes les dispositions prévues par EDF dont l’efficacité sera vérifiée à l’aide d’un programme de surveillance.

Incident de vidange incontrôlée du circuit primaire principal d’un réacteur à Golfech

Classée au niveau 2 sur l’échelle internationale INES en raison de ses conséquences potentielles sur la sûreté du CNPE de Golfech (Tarn-et-Garonne), la mise sous vide incontrôlée du circuit primaire principal du réacteur n° 2 lors de sa vidange, le 8 octobre 2019, a fait l’objet d’une analyse approfondie par l’IRSN en 2020 et 2021. Ce dernier a mis en évidence de nombreux facteurs, fortement imbriqués, qui ont fragilisé plusieurs lignes de défense techniques, humaines et organisationnelles. À la suite de l’expertise de l’IRSN, la direction du parc nucléaire d’EDF et le CNPE de Golfech se sont engagés à mettre en œuvre diverses actions de nature technique et organisationnelle visant à fiabiliser les transitoires dits sensibles, notamment ceux de vidange du circuit primaire principal.

Brèves
illustration breves
icone interaction avec citoyen

Des experts en interaction avec les citoyens

Dans le cadre de sa politique de transparence et d’ouverture à la société, l’IRSN a contribué en 2021 à différentes actions visant à associer la société civile à ses travaux d’expertise. Il a parallèlement poursuivi auprès des représentants des Commissions locales d’information (CLI) ses actions de formation à la sûreté nucléaire et, plus généralement, a échangé sur les enjeux techniques de la sûreté nucléaire. L’Institut a également organisé avec l’Anccli, le 22 juin 2021, une journée d’échanges au sujet de la poursuite d’exploitation des cuves des réacteurs de 900 MWe « au-delà de 40 ans ». Cette journée fut l’occasion d’expliciter les expertises réalisées, de préciser les conclusions tirées et de répondre aux questions recueillies. Avec l’Anccli et le Clis de Bure, l’IRSN a organisé des réunions d’échanges les 3 février et 30 mars sur la gestion des déchets HA-MAVL. De plus, Il a participé à la réunion publique organisée par le ministère de la Transition écologique le 8 mars au sujet des premiers enseignements de la concertation post-débat public relative au 5e Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs.

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Forum EUROSAFE 2021

Organisé par l’IRSN sous l’égide du réseau ETSON des TSO européens, les 22 et 23 novembre, le Forum EUROSAFE 2021 a réuni près de Paris quelque 250 participants d’une vingtaine de pays autour du thème « Accident de Fukushima-Daiichi, Covid-19 et menaces liées au changement climatique : sûreté nucléaire et radiologique dans un monde en rupture ».

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Éléments de sûreté nucléaire les réacteurs à eau sous pression

Refonte de l’ouvrage intitulé Éléments de sûreté nucléaire, ouvrage coordonné et principalement rédigé par Jean Couturier dans une collection de l’IRSN dont la version initiale avait été publiée en 1996, cette nouvelle édition est téléchargeable sur le site Internet de l’IRSN. Elle présente un état de l’art des connaissances dans le domaine de la sûreté nucléaire au fil de 40 chapitres qui apportent des éclairages complémentaires tels que l’histoire des évolutions techniques et réglementaires, le progrès de la sûreté par la R&D, les enseignements tirés du retour d’expérience, etc.

reacteur institut Laue-Langevin

Réexamen périodique du réacteur à haut flux de l’Institut Laue-Langevin

Réacteur nucléaire destiné à la recherche scientifique dans différents domaines tels que la physique de la matière ou la biologie moléculaire, le réacteur à haut flux (RHF) exploité à Grenoble par l’Institut Laue-Langevin (ILL) a fait l’objet d’un réexamen périodique. Après avoir expertisé le dossier correspondant, l’IRSN a souligné le travail important mené par l’ILL pour vérifier la conformité de l’installation aux exigences applicables et réévaluer sa sûreté, s’agissant notamment des dispositions constitutives du « noyau dur post-Fukushima » du réacteur en cas d’aléas extrêmes. L’Institut a toutefois mis en évidence la nécessité d’améliorations de sûreté complémentaires, en particulier le renforcement de la fiabilité du pont polaire du bâtiment du réacteur et la maîtrise des conséquences d’un incendie qui se déclarerait dans ce dernier.

Projet de densification des piscines C, D et E de La Hague

Dans l’attente de la mise en service par EDF de sa future piscine d’entreposage d’assemblages combustibles usés, ORANO projette d’augmenter la capacité opérationnelle de trois piscines d’entreposage de combustibles nucléaires usés qu’il exploite sur son site de La Hague (Manche), en réduisant la taille des équipements d’entreposage utilisés (densification). À la demande de l’ASN, l’IRSN a expertisé en 2021 le dossier d’options de sûreté de ce projet et rendu un avis, disponible en version commentée sur son site web. Dans ses conclusions, l’Institut considère que les options de sûreté retenues pour cette densification sont globalement adaptées. Il a par ailleurs identifié des sujets qui devront être pris en compte dans le dossier transmis à l’appui de la future demande d’autorisation. Ceux-ci concernent notamment la conception des nouveaux équipements d’entreposage ou l’efficacité des systèmes de refroidissement de l’eau des piscines.

piscine de refroidissement ORANO La Hague